La Millième Nuit – Alastair Reynolds

Le Bélial

UHL

Dans plusieurs millions d’années…
Ayant essaimé à travers l’ensemble de la Galaxie, l’humanité s’est divisée en une myriade de cultures et civilisations adaptées à des contraintes environnementales et des modes de vie aux variétés pour ainsi dire sans limites. Ainsi en est-il de la Lignée Gentiane, mille clones immortels ou presque, issus d’une souche unique, qui arpentent les étoiles depuis des centaines de milliers d’années. Si, au fil du temps, chaque membre de la Lignée s’est singularisé, explorant et poursuivant ses intérêts propres, tous les deux cent mille ans, selon une antique tradition œcuménique, l’étrange fratrie se réunit pour partager ses expériences, souvenirs et projets – des célébrations grandioses qui culminent lors de la Millième Nuit. Jusqu’à ce qu’un grain de sable ternisse les dernières retrouvailles… Un détail, une anomalie insignifiante derrière laquelle pourrait bien se cacher un complot à l’échelle proprement astronomique…

Un Reynolds qui renoue avec la hard-sf ?

Mes dernières lectures des romans d’Alastair Reynolds m’avaient assez déçue, à tel point que je n’ai pas eu l’envie de rédiger une critique pour chacune d’entre elles (la suite des Enfants de Poséidon, et la trilogie de Revenger que j’ai abandonné en cours en 2022) Le principal grief s’agissant de ses dernières productions littéraires tenaient dans son orientation vers le Young Adult, ou la facilité, avec par exemple, la série des Revenger très orientée vers un public jeune, même Les Enfants de Poséidon n’avaient pas réussi à totalement me convaincre avec une certaine redondance.

Je me demandais si nous retrouverions l’auteur de L’Espace de la Révélation….Aussi, quand la maison du Bélial décida de publier La Millième Nuit dans sa collection UHL, l’espoir embrasa-t-il mes neurones. En effet, cette décision était évidemment un signe de production mature et travaillée, exit les grosses ficelles, le recyclage de concepts déjà vus et la SF pour enfants. Juste, n’est-ce pas ? Puis, ma joie initiale a décliné lorsque j’ai constaté que le texte datait de 2005…Cela ne remet en rien l’intérêt du récit, mon raisonnement était erroné…

L’Univers de Millième Nuit

Il y a des centaines de millier d’années, Abigail Gentian décida de se cloner en plusieurs exemplaires, plus précisément en la bagatelle de 1000 clones. Chacun vit sa trajectoire se séparer de la vie originale, traçant ainsi une pluralité d’individus qui exploserait l’unicité de la version originale. L’expérience vécue au fil des siècles changeait à la fois les perceptions, les saveurs, les points de vue mais également la psyché. Aussi, d’un être unique nous aboutissons sur cette planète tout aussi unique à une réunion de presque 1000 Abigail Gentian qui ne sont plus Abigail, mais bien des individus à part entière. Ce constat, le lecteur y parvient rapidement à travers les dialogues que les clones échangent les uns avec les autres, et surtout grâce à l’intermédiaire des fils qui sont diffusés toutes les nuits durant… 1000 nuits.

Les fils sont un condensé des aventures, des rencontres, des découvertes, ou encore de l’émerveillement de chacun d’entre eux durant un très longue période; à l’issue de la diffusion de l’ensemble de ces souvenirs, un vainqueur sera désigné, se couvrant de prestige et devant organiser la prochaine réunion.

Ces retrouvailles participent au maintien de l’unité de ce groupe, tout en étant l’occasion de festivités de grande ampleur, et de discussion plus politiques pour les leaders qui se sont dégagés au fil du temps. La planète sur laquelle ils se retrouvent, a été façonnée spécialement pour l’occasion, grâce à une technologie très avancée alliée à un art consommé de la mise en scène – si possible.

Cette fois-ci, Campion est à la baguette, et il s’avère un chef d’orchestre hors pair, sachant divertir la compagnie, réservant des surprises, conférant une ambiance unique aux lieux, distillant une certaine magie,…. Il noue des liens particuliers avec Purslane. C’est cette dernière qui va faire dérailler le train indolent des réjouissances. En effet, elle remarque une bizarrerie dans un fil d’un des clones : il n’était plus ou il devait être. A partir de ce moment, le duo va chercher à éclaircir ce mystère, initialement plus par jeu que par inquiétude, même si cette dernière se conviera inévitablement à la fête.

Peu à peu, le lecteur découvre d’autres facettes du monde créé par Alastair Reynolds, qui dépasse la simple planète. Non seulement les fils diffusés chaque soir couvrent la galaxie et davantage, permettant de s’émerveiller devant la magnificence de l’univers, mais l’enquête que mènent Campion et Purslane nous ouvre les fils de manigances qui dépassent largement le cadre des clones d’Abigail. Malgré notre impression initiale de groupe tout aussi vaste d’unique, nous apprenons que ce genre de procédés est bien ancré, largement maîtrisé dans ces sociétés, et qu’une profonde rivalité entre différentes organisations existe avec des enjeux sidéraux…

C’est en dévoilant peu à peu ce qui se cache derrière l’effacement d’une présence que Reynolds lève le voile sur son univers à la technologie très évoluée, avec un transhumanisme assumé, mais également des frictions, des clans et des enjeux politiques d’envergure. Tout ceci n’est qu’effleuré car l’auteur se concentre sur l’intrigue, mais il parvient à nous délivrer une novella de haute tenue, tout en nous mettant l’eau à la bouche.

La Millième Nuit s’inscrit dans un ensemble plus large, car elle servira de base à un roman phare de Reynolds : House of Suns. Dans ce texte, l’auteur parvient à distiller l’essence même de sa plume et de son imagination faite de futur éloigné, de technologie poussée, d’émerveillement galactique, de grandeur et de mystère.

Ce livre est pour vous si :

  • vous aimez les formats courts, car vous souhaitez lire plein de livres!
  • vous recherchez une histoire dans un futur très éloigné
  • vous rêvez de découvrir la fontaine de jouvence

Je vous le déconseille si :

  • les clones, ben voyons, et l’éthique dans tout cela ?
  • une terraformation ? Et le respect de la planète alors !?
  • vous n’aimez tout simplement pas la science-fiction : pourquoi lire cette chronique, alors ?

Autres critiques :

Mon TrollGromovarL’épaule d’OrionUn Dernier Livre -YozoneL’AmiSelbonle makiY a pas d’osMondespoches

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La Millième Nuit d’Alastair Reynolds

Toujours aussi belles, les illustration d’Aurélien Police et j’avoue un faible particulier pour celle-ci. Initialement, je pensais que ce court roman se déroulait dans le même monde que Les Enfants de Poséidon ( ce n’est pas le cas). En revanche, cela reste d’à propos!

Une traduction de Laurent Queyssi

17 réflexions sur “La Millième Nuit – Alastair Reynolds

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